Un défaut. un mauvais comportement. une mauvaise attitude. un mauvais caractère. Nous en avons tous.
Mais est-ce que cela vous est déjà arrivé d’être conscients de vos propres défauts ? Sûrement. Est-ce que cela vous arrive d’être conscient lorsque ce défaut apparaît ? Peut-être. Et est-ce que cela vous arrive de ne pas avoir la volonté de l’estomper ? Et bien peut-être plus que vous ne le pensez.
Évidemment, certains d’entre nous se pensent extérieurs à cette manière de penser. Mais en réalité, cela peut arriver à tous, d’une manière plus ou moins visible.
Quand notre stéréotype nous dépasse
Prenons un exemple. Il peut arriver à certains d’entre nous de prendre une quantité déraisonnable de nourriture, pas par volonté de le faire, mais simplement parce que nous avons une étiquette de « gros mangeur » collée à nous parce que dans notre vie, certaines personnes ont pensé cela de nous. Par conséquent, pour nourrir ce stéréotype qui nous semble nous définir, nous allons nous enfermer dans cette description. Et c’est paradoxal, car ce n’est pas forcément l’image que nous avons de nous mais c’est l’image que nous imaginons que les autres ont de nous. Alors, il est vrai que manger est un exemple somme toute assez anodin mais cela peut concerner des caractères plus problématiques.
Nous pouvons « bouder » régulièrement ou être en colère relativement souvent. Nous pouvons nous émouvoir trop facilement ou au contraire jouer l’indifférence face à tout ce qui nous entoure. Nous pouvons réaliser des actions que nous-mêmes ne jugeons pas bonnes en connaissance de cause et continuer sans se remettre en question. C’est bien là le nœud du problème. La conscience dans l’action jugée mauvaise ne peut pas donner du bon.
Nous ne sommes plus qu’un acteur
Ce à quoi cette attitude va principalement mener est de devenir une parodie de soi-même. C’est à dire que nous savons très bien que nous avons une attitude mauvaise pourtant nous allons quand même agir de cette manière, voire exagérer ce comportement défectueux, car c’est notre personnage et que nous n’avons pas la volonté de déroger à notre définition. Nous devenons ainsi des acteurs. Acteurs de nous-même qui ne montrons plus notre véritable soi mais juste l’image que nous voudrions montrer de nous. Et c’est là toute la différence. Notre réflexion va toujours se porter sur ce que nous voulons que les autres voient de nous et non pas sur le fait d’être réellement soi-même. Nous sommes ainsi dépossédés de notre identité et l’essence même de ce que nous sommes est remplacée par des caractères qui n’ont pas leur place en nous. Et quand un désaccord s’immisce de force en nous, il ne vient entraîner que dissonance et contradiction.
« Je suis comme ça et il faut l’accepter »
Y a-t-il une justification acceptable à ce genre de comportement ? Nous savons tous que la réponse est négative. Évidemment, il peut y avoir des circonstances atténuantes, un passé, un environnement qui amène à cela comme l’exemple de la personne qui mange trop parce que ses amis, sa famille l’ont toujours vu comme cela, il peut y avoir des explications à un comportement. Néanmoins, il n’y a aucune raison de l’accepter. Malgré tout, il peut nous arriver à tous, et moi le premier, d’en arriver à défendre une mauvaise attitude sans qu’au fond nous ayons de véritables arguments pour y parvenir.
Je suis comme ça et il faut l’accepter.
Voilà le point de non-retour où nous finissons lorsque nous n’avons pas la volonté de nous justifier. Cette phrase, dernier rempart à la vérité de notre âme, ne mène à rien d’autre qu’une fermeture à toute réflexion à la fois pour nous-même mais également ceux qui nous écoutent. Il n’y a ainsi pas de remise en question ou d’évolution possible alors que tout le monde sait que le problème existe et subsiste. Par conséquent, tout le monde se met à faire semblant de ne pas voir cette attitude et tout le monde fait de son mieux pour accepter cet état de fait, vivant ainsi dans un compromis inconfortable.
Notre image finit par nous remplacer
Cette image de nous avec laquelle nous vivons et que nous acceptons malgré notre opposition sur le fond finit par remplacer la personne que nous sommes réellement. Car au fil du temps, comme un poison diffus, celle-ci s’infuse et nous détruit. Elle nous détruit pour reconstruire quelque chose d’infâme et difforme qui ne nous correspond pas mais qui finit inexorablement par s’assimiler en nous. Un jour, notre conscience du problème disparaît, nous laissant persuadés que nous sommes toujours nous-même. Difficile à partir de ce moment-là de nous en débarrasser.
Malgré tout, pourquoi en viendrions-nous à ce qu’un défaut vienne faire partie de nous consciemment ? Pourquoi cela nous viendrait en tête de vouloir conserver un trait de caractère qui ne fait en réalité que nous desservir ?
Individualité et recherche d’attention
Il y a premièrement cette recherche de l’individualité. Cette envie d’exister en tant qu’individu qui nous guide jusqu’au point où nous décidons de faire d’un défaut notre identité. Il est vrai que ce dont nous avons l’habitude a tendance à être omis tout simplement de notre vision et que nos esprits ont ce penchant à voir ce qui dénote, ce qui est différent, souvent du premier coup d’œil. Cela marche donc avec les bonnes attitudes comme avec les mauvaises. Nous aurions ainsi l’impression qu’un mauvais comportement nous rendrait plus unique qu’un bon comportement.
Une des explications les plus logiques serait de parler du biais de négativité. La « tendance des gens à accorder un poids et une considération disproportionnés aux informations et aux événements négatifs dans la prise de décision et la perception » (Wikipédia) érigerait sur un piédestal un défaut plus qu’une qualité et nous donnerait plus conscience que c’est le mauvais qui nous fait ressortir du lot.
Nous pouvons aussi parler de la sensation de ne pas parvenir à être bon. De ne pas réussir à être suffisamment supérieur aux autres pour nous démarquer. De ressentir un échec à chaque fois que nous tentons d’avoir un bon comportement parce que… Ce n’est pas assez bien. Parce que ce n’est pas assez brillant. Parce que ce n’est pas assez visible.
Car oui, au-delà de tout cela, il y a cette perpétuelle recherche d’attention. Bien au-dessus du fait que nous nous regardons et que nous ne voulons être comme personne, il y a le fait que nous voulons aussi que les autres nous regardent. Et c’est cette volonté persistante qui va entraîner tous ces comportements en conséquence. En effet, que vaut une mauvaise attitude face à la récompense de l’attention qui nous est portée ? Assurément pas grand-chose. Voilà pourquoi nous pouvons nous abandonner au mal et voilà pourquoi une attitude jugée mauvaise finit par trouver une justification absurde.
Paresse et vanité
Deuxième explication, il peut y avoir une forme de paresse voire de vanité lorsque vient à nous la vérité de notre propre contradiction. En effet, de peur de voir les implications que demanderait un changement de notre part, nous préférons conserver notre attitude parce que cela nous laisse aussi dans notre zone de confort. Il n’y a pas de réflexion à avoir, il n’y a pas de remise en question mais il y a juste un comportement à adopter. Comme un automatisme, nous savons déjà comment réagir face à une situation même si la manière est au fond, mauvaise. Et nous préférons rester dans l’ignorance que craindre de voir la personne que nous sommes réellement. Si jamais nous regardons en nous et qu’il se trouve que nous sommes médiocres, que ferions-nous ? La prise de conscience nous obligerait à voir nos défauts et nos failles, et nous emmènerait vers une estime de soi salie, souillée, voire brisée. A choisir, préférerions nous le vide de l’inconnu qui nous plonge dans les méandres de notre noirceur ou les deux pieds sur le sol instable de nos caractères mais dont la lumière en éclaire le moindre recoin ?
Lumière ténébreuse et ténébreuse lumière.
Et cela peut même devenir de la vanité lorsque face à la vérité, nous refusons tout simplement de changer. Nous développons comme bouclier un factice sentiment de supériorité qui amène à cette non-remise en question et les arguments n’ont plus aucune valeur parce que l’acceptation et l’assimilation deviennent tout simplement impossibles de par la position adoptée.
Plus le temps va passer et plus il sera difficile de changer un comportement. C’est vrai. Et pourtant, en même temps, je peux affirmer également que ce n’est pas vrai. En réalité, n’est-ce pas finalement encore cette sensation de ne pas pouvoir qui nous mène à ce blocage ? Se dire que nous ne pouvons pas, n’est-ce pas en vérité juste une manière détournée de se dire que nous ne le voulons pas ?
L’exemple de l’adulte
Un adulte c’est quelqu’un qui est parvenu au terme de sa croissance, à son plein développement, biologiquement parlant mais aussi qui fait preuve d’équilibre, de maturité (Larousse).
Je me considère comme un adulte. Néanmoins, il n’y a pas d’âge réel où soudainement, il y aurait eu une transformation. C’est un processus, une progression qui nous guide et nous mène petit à petit vers cette évolution subjective et propre à chacun. Pourtant, des stéréotypes existent et ils ont une véritable influence, parfois à tort, sur notre vision de ce que nous devrions être en tant qu’adulte.
Les adultes, de par leur expérience, leur âge et leur sagesse ont une certaine légitimité à être écouté et respecté. Il est jugé normal, par exemple, qu’un enfant écoute un adulte et qu’il y ait une forme de confiance naturelle dans les paroles de ce dernier. Il est jugé normal également que le comportement d’un adulte soit acceptable et qu’il n’y soit rien trouvé à redire par corrélation avec sa responsabilité innée.
Dit comme cela, il est vrai que nous pourrions croire que l’adulte a une image parfaite. Pourtant, nous savons bien que cela est loin d’être le cas et pour cause, avant d’être un adulte, il est d’abord un homme. Et un homme a toujours des faiblesses et des failles. Il lui arrive ainsi conséquemment d’avoir des mauvais comportements et d’être dans l’erreur. Et c’est tout à fait normal. Cette position de supériorité, nourrie par le stéréotype, nous fait tomber dans ce qui a pu être développé plus haut, c’est à dire la vanité. Cette vanité qui nous enorgueillit avec l’âge et l’expérience acquise. Des justifications à notre raisonnement qui rendent difficile l’existence d’un tort de notre part. Tout ce chemin parcouru, toutes ces choses que nous avons vécu, légitiment nos actes alors que la vérité est qu’en aucun cas, ils ne nourrissent un argumentaire vis-à-vis de notre soi-disant supériorité. Cette expérience nous rend tout simplement sourds à toute argumentation et une remise en question devient une forme de défiance et de provocation qui ne parvient pas à être entendue.
En résumé, être un adulte n’est pas une justification à notre comportement. Et l’ériger comme une barrière à tout changement, c’est aussi et j’en reviens au sujet, être une parodie de soi-même. Être une parodie d’adulte. Être quelqu’un qui n’est pas réellement nous. Il faut s’en prémunir et comme souvent, être capable de prendre du recul sur soi et se remettre en question. Et ce, peu importe l’âge, l’expérience ou un quelconque objectif atteint qui pourrait donner une imaginaire supériorité.
Conclusion
Exagérer un trait, c’est être une parodie de soi-même. Justifier une action par son âge adulte, c’est être une parodie de soi-même. Être conscient de ses défauts et ne pas les corriger, c’est être une parodie de soi-même. Bref, je pense qu’il est difficile d’y échapper. Toutefois, il n’est pas impossible de s’en défaire. Evidemment, cela est difficile et ressemblerait à un combat contre une addiction au vu de la profondeur à laquelle s’est ancrée cette mauvaise « habitude » en nous. Pourtant, la conviction du changement et l’espérance absolue, et je dis bien absolue, de sa réalisation peuvent nous changer profondément. Croire, c’est pouvoir.