Il y a des œuvres qui vous subjuguent par ce qu’elles ont à raconter. Il n’y a pas de spectacle, pas de surenchère, pas de subterfuges. Mais il y a une honnêteté et une réalité qui sont dévoilés comme si cela s’était échappé de notre monde. Une impression floue à la frontière entre le réel et la fiction qui nous permet de croire et de ressentir des émotions aussi véritables que dans notre vie réaliste.
Merci Kyoto Animation
J’avoue que je connaissais le studio surtout de nom et que j’en entendais beaucoup de bien mais que jusqu’à aujourd’hui, je ne m’étais jamais vraiment penché là-dessus. Mais maintenant que c’est fait, il y a plusieurs animés que j’ai regardé et dont j’ai remarqué la qualité:
- La mélancolie de Haruhi Suzumiya
- Violet Evergarden
- City the Animation
- A Silent Voice
- Sound! Euphonium
Qui sont l’œuvre de Kyoto Animation. Ce sont tous des animés avec une identité assez unique et une animation toujours au-dessus de la moyenne. Ils sont assez différents les uns des autres et cela montre une grande diversité dans les univers développés. Kyoto Animation est un studio qui fait un véritable travail pour donner une identité à ses œuvres et c’est pour cela qu’il faut leur rendre hommage.



Une maîtrise du son incroyable
La musique est un élément central de Sound! Euphonium. Puisque nous suivons une fanfare, c’est normal que celle-ci soit omniprésente. Toutefois, beaucoup d’animés n’arrivent pas à le réaliser correctement ou n’ont pas les moyens de le faire correctement. Ici, les musiques extra-diégétiques et intra-diégétiques sont très marquantes et pour ma part, je dirais même incroyables. Les différentes orchestrations sont impressionnantes et les thèmes restent vraiment dans la tête. Le travail fait entre autres, par le compositeur Akito Matsuda sur l’identité marquée de la série est réussi car de nombreuse musiques me restent en tête alors que j’ai terminé le visionnage. Le thème principal, « Sound! Euphonium » est décliné en de nombreuses variations et celles-ci ne sont pas redondantes mais rafraîchissantes, car elles parviennent à chaque fois à raconter une nouvelle émotion ou une nouvelle histoire. De plus, leur utilisation n’est pas extravagante. Il n’y a pas une volonté d’en mettre partout et tout le temps. Au contraire, il y a de nombreux moments où le silence prend sa place. Et c’est là que je veux parler de la gestion de celle-ci car les scènes sans musiques en deviennent marquantes et laissent place à l’émotion. Cela permet de supprimer un élément de la scène, la musique donc, et de donner au spectateur de se concentrer sur ce qui reste. Les dialogues, la mise en scène, l’émotion et les mouvements des personnages, le paysage, toutes ces choses sont ainsi exacerbées et nous rendent plus réceptifs à ce qui se passe.
(L’OST est disponible sur les plate-formes de streaming, allez l’écouter.)
Une mise en scène minimaliste
Minimaliste n’est pas un défaut. Ici, la mise en scène est minimaliste. Mais il y a un véritable travail d’artiste pour que nous ayons cette impression là. Et que pour cette impression nous immerge réellement dans la scène.
Souvent dans les scènes, il n’y a « pas grand-chose ». On verse même plutôt dans la scène réaliste alors que souvent, il est cherché à montrer ce qu’il faudrait voir ou ce qu’il faudrait ressentir. Mais ici, l’essentiel est toujours de mettre en avant ce qui est réellement et c’est là que la mise en scène et l’animation sont impressionnantes. Car elles parviennent à nous faire véritablement ressentir ce que le personnage ressent ou ce que la scène nous montre.
Même les dialogues sont sublimés. Déjà, ils sont bien écrits (mais on y reviendra un peu plus tard) mais la mise en scène rajoute, à chaque fois, ce qu’il faut pour faire la différence. Un gros plan des yeux, un dialogue sans musique puis avec lorsqu’il y a un changement d’ambiance, un plan de biais pour indiquer du malaise, puis du mouvement lorsqu’il y a un changement radical. On a alors l’impression qu’il ne se passe pas grand-chose et pourtant, tous ces détails permettent de souligner la scène et de nourrir le propos et l’émotion.









Personnages, relations et dialogues
Le développement des personnages et globalement de la fanfare sont le cœur de l’animé. Pour contextualiser rapidement, le but avéré de la fanfare du lycée est d’aller chercher la médaille d’or au concours national, concours le plus réputé au niveau du lycée dans le Japon. Et au-delà de la dimension de l’entraînement et du dépassement de soi (qui finalement ne prend pas tant de place que cela, car une fois montré, il n’est plus développé par la suite), il y a un vrai développement mental des personnages qui ne s’arrête pas seulement au niveau de la fanfare. Car il y a aussi le lycée et donc des problématiques liées qui sont montrées notamment l’orientation. Parce qu’un des partis pris de Sound! Euphonium, c’est aussi de suivre nos personnages durant leurs trois ans de lycée et donc de pouvoir suivre leur évolution non en tant qu’instrumentiste mais en tant qu’humain.
Et si le personnage principal est Kumiko, cela n’enlève en rien le développement des autres personnages. Tous ceux que nous voyons à l’écran, sont suffisamment développés pour que nous les connaissions assez. Pour que nous puissions interpréter leurs réactions. Pour que nous puissions avoir de l’empathie pour eux. Aucun des personnages n’est parfait. Mais n’est-ce pas le reflet de notre réalité ? Ici, justement personne n’est lisse et chacun possède son propre égo. Dans la fanfare, tous les instrumentistes ne sont pas amis mais unis par un même but et c’est ce que nous pouvons voir dans cet animé. Le monde n’est pas manichéen et la fanfare non plus car elle est à l’image du monde. Et lorsqu’il y a un objectif à l’unisson, il y a forcément des tensions entre de nombreuses personnalités différentes et c’est normal car chacun peut avoir sa vision pour mener l’objectif. Mais, et c’est peut-être ce qui diffère de la réalité (ou c’est peut-être un peu exagéré), ici, les gens se parlent et finissent toujours par dire ce qu’ils pensent réellement. Et c’est en cela que Sound! Euphonium est fort car il parvient à nous montrer des personnes peut-être aux antipodes dans leur personnalité qui par le dialogue parviennent à un consensus, parce que l’objectif de chacun dans la fanfare reste toujours de gagner cette médaille d’or.
Les dialogues sont d’ailleurs excellents car ils ne sont jamais trop longs ou trop courts mais en plus de nourrir l’image que nous nous faisons du personnage, ceux-ci ne sont pas stéréotypés. Alors, oui, cela donne l’impression que tout le monde est intelligent, mais les échanges n’en deviennent que plus intéressants. Car la personnalité de chacun transpire au travers de chaque ligne de dialogue. La timidité, la peur, l’égo, la simplicité, l’envie de changer, toutes ces choses se ressentent lorsque nous écoutons les personnages.
Ce n’est pas un animé de musique
Quand j’ai regardé Sound! Euphonium, j’ai eu un peu le même sentiment que lorsque j’ai regardé Ping-Pong, une autre série d’animation. Même si ces animés sont centrés sur un domaine en particulier et c’est véritablement l’impression que j’ai eu au début de chacune des œuvres, il s’avère qu’ils vont bien au delà de cela. Il y a une réalité au delà de la fanfare et du ping-pong. Dans Sound! Euphonium, je trouve même ce côté exacerbé car nous suivons notre protagoniste durant près de 40 épisodes, ce qui permet de voir lentement son évolution au fil de la série. Nous pouvons donc voir de nombreux questionnements sur cette activité de fanfare qui n’est finalement qu’une activité de club. Est-ce que je dois tout donner pour la fanfare ? Est-ce que la musique doit devenir mon activité ? Qu’est que je dois faire de ma vie ? Quel est mon objectif ? Qu’est-ce que je dois changer ? Est-ce que notre amitié subsistera après le lycée même si nous changeons ? Est-ce que tous les moments vécus vont disparaître ? Tous ces questionnements, à l’âge du lycée sont légitimes et tentent de trouver une réponse dans Sound! Euphonium. Mais ce sont des réflexions qui sont valables pour toute la vie et certaines de ces questions parviendront à trouver écho en nous.
Rendre hommage au banal
Sound! Euphonium, c’est l’histoire d’une fille qui rejoint la fanfare du lycée. C’est aussi simple que cela. Pourtant, dans cette simplicité, il y a un parcours et une évolution. Il y a un personnage qui se laisse porter sans conviction et qui finit par trouver un but dans sa vie. Un personnage qui se dépasse pour affronter les obstacles et qui veut devenir meilleur que ce qu’elle a été autrefois. C’est aussi simple que nos vies à nous et pourtant, c’est ce qui rend magnifique l’œuvre qu’est Sound! Euphonium. Un hommage au banal qui viendra résonner en nous jusque dans l’infinité.
